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Alceste ou le Triomphe d’Alcide Jean-Baptiste Lully
Carte d’identité de l’œuvre : Alceste ou le Triomphe d’Alcide de Jean-Baptiste Lully |
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Genre | opéra : tragédie lyrique |
Librettiste | Philippe Quinault, d’après la tragédie Alceste d’Euripide |
Langue du livret | français |
Composition | en 1673 |
Création | en 1674 au Palais-Royal à Paris |
Forme | tragédie en un prologue et cinq actes |
Instrumentation | voix, chœur et orchestre |
Composition et création
Alceste ou le Triomphe d’Alcide est la deuxième tragédie lyriqueC’est le nom donné à l’opéra à cette époque en France, par opposition avec l’opéra italien. C’est Lully qui lui donne naissance avec son librettiste Quinault, après avoir obtenu en 1672 le privilège de l’Académie royale de musique. de Lully et Quinault1699-1783. Il est appelé « librettiste » car il rédige le livret, c’est-à-dire le texte de l’opéra ainsi que les indications scéniques.. Curieusement, les répétitions ont lieu chez Madame de Montespan, comme si l’on était encore à l’époque des ballets de cour, lorsque le roi et quelques courtisans répétaient des heures entières. Ce sont essentiellement des professionnels qui dansent désormais, mais cela montre que les distinctions nettes que l’on fixe entre les genres aujourd’hui n’existent pas réellement à l’époque.
Alceste est créée au Palais-Royal à Paris en 1674, et jouée trois mois plus tard dans la cour de marbreSeule cette partie du château peut à l’époque servir de cadre à la pièce, mais l’endroit est déjà majestueux, avec une façade donnant sur le grand canal. La cour n’emménage définitivement à Versailles qu’en 1682. de Versailles, à l’occasion des grandes fêtes organisées pour la reconquête de la Franche-Comté. Au château, le public est enthousiaste. En revanche, l’œuvre est reçue assez froidement à Paris dans un premier temps, en raison d’une cabale menée contre Lully. Une partie du public juge que le privilègeLe privilège de l’Académie royale de musique interdit à tout autre de monter des opéras de façon normale. qu’il a obtenu deux ans auparavant est scandaleux, et s’arrange pour que personne n’applaudisse à la première représentation. Les critiques du lendemain ne sont pas meilleures : Oh quelle musique de chien ! […] Oh quelle musique de diable !
Cette déception n’est que provisoire : la nouveauté du langage de Lully, dont la qualitéIl attache un soin tout particulier à ce que sa musique épouse la langue française sans en transformer le rythme : c’est le récitatif caractéristique des œuvres de Lully. est incontestable, place en peu de temps l’opinion de son côté. L’opéra a désormais une place en France, même s’il n’en porte pas encore le nom.
Description de l’œuvre
Alceste comporte cinq actes et un prologue. Quinault y reprend la tragédie d’Euripidepoète tragique grec du Ve siècle av. J.-C. dans laquelle Admètepersonnage de la mythologie grecque, roi de Phères en Thessalie semble pouvoir échapper à la mort à condition que quelqu’un s’offre à sa place, ce que fait son épouse Alcestepersonnage de la mythologie grecque, fille de Pélias, roi d’Iolcos en Thessalie. AlcideHercule s’offre alors d’aller la chercher aux enfers, à condition qu’elle lui appartienne ensuite. Il renonce à elle finalement, et Apollon réunit les deux époux.
Quinault adapte le texte d’Euripide à son style et à son époque, ce qui donne lieu à une querelleLes querelles dans le monde littéraire sont fréquentes à cette époque. Les défenseurs de la tradition lui reprochent de transformer le récit original. mémorable, doublant la cabale contre Lully. Les dimensions monumentales et le style imposant de la tragédie lyrique Alceste traduisent de la part de Lully et Quinault une compréhension très juste de ce que désire Louis XIV : concevoir un miroir de sa grandeur. Quinault confère à chaque acte un éclat différent en intégrant de grandes scènes fastueuses :
- Acte I : fête marine pour Alceste et Admète, par les nymphes de la mer, les tritons, les matelots et pêcheurs.
- Acte II : siège sur l’île de Scyros avec emploi de machines de guerre.
- Acte III : pompe funèbre pour la mort d’Alceste.
- Acte IV : une fête infernale accueille Alceste dans le palais de Pluton.
- Acte V : réjouissances avec présence d’un arc de triomphe au milieu de deux amphithéâtres pour célébrer le triomphe d’Alcide.
De son côté, Lully parvient à une autorité et une grandeur dans son écriture très en rapport avec l’image royale.
Focus sur la Loure pour les pêcheurs
La loure est une danse pratiquée en France à la fin du XVIIe siècle et au XVIIIe. Probablement accompagnée de la loureinstrument de la famille des cornemuses, notamment fabriqué en Normandie à l’origine, c’est une danse à deux temps, mais à division ternaireChaque temps est divisé en trois.. Certains compositeurs ont introduit des loures dans leurs œuvres à l’époque baroque : ainsi, on en trouve dans la Suite française n° 5 pour clavecin de Johann Sebastian Bach, ou encore dans les tragédies lyriques Médée de Charpentier et Castor et Pollux de Rameau.
La Loure pour les pêcheurs d’Alceste est jouée pendant la fête marine du premier acte. Les pêcheurs se trouvent alors en compagnie des nymphes de la mer et des tritons. L’air comporte deux courtes parties, chacune étant reprise et introduite par une anacrouseou « levée » : notes qui précèdent le premier temps fort du morceau. Son premier temps très marqué dévoile ses origines populaires ; son rythme pointé rappelle celui de la siciliennedanse de tempo modéré, souvent de caractère pastoral, et présentant un rythme pointé bien caractéristique, en plus lent.
Focus sur le Rondeau pour la gloire
Au Moyen Âge, le rondeau est l’une des formes musicalesavec la ballade et le virelai les plus utilisées dans la chanson. Cette forme a la caractéristique d’alterner un refrain avec des couplets.
Le Rondeau pour la gloire extrait d’Alceste utilise l’orchestre au grand complet : cordes, hautbois, bassons, trompettes, timbales et basse continuel’accompagnement typique de l’époque baroque, constituée d’un instrument à archet grave (violoncelle ou viole de gambe) et d’un clavier (orgue positif ou clavecin). Le refrain contraste avec les couplets de par son instrumentaion : en effet, les trompettes et timbalesCes instruments sont utilisés assez rarement à l’époque. Ils sont réservés aux musiques festives., instruments les plus puissants, ne jouent que dans le refrain. De plus, en do majeur du début à la fin, ce refrain donne une impression de solidité et de stabilité, tandis que les deux couplets, passant dans d’autres tonalitésLe premier passe en sol majeur, la tonalité la plus proche de do majeur. Le deuxième passe en ré majeur et mi majeur brièvement, deux tonalités plus lointaines., semblent moins statiques.
Auteur : Jean-Marie Lamour