Auteur : Vincent Bessières
(mise à jour : août 2005)
Accueil / Portraits de jazzmen / Portrait de Jean-Pierre Drouet
Jean-Pierre Drouet (1935-)
Je suis devenu percussionniste parce que la percussion tient un rôle prééminent dans toutes les musiques les plus passionnantes de notre temps. Elle m’a permis de pénétrer et pratiquer les genres les plus divers : jazz, music-hall, musique contemporaine, musiques orientales, etc
. Jean-Pierre Drouet est un irrésistible touche-à-tout. Sous ses doigts, les objets détournés, les ustensiles façonnés ou les instruments extra-européens transfigurés deviennent d’incroyables pourvoyeurs de sonorités aussi surprenantes que poétiques.
Né en 1935, autodidacte, Drouet a largement contribué à élargir la gamme des percussions traditionnellement admises dans les orchestres, faisant preuve d’une fantaisie imaginative sans limite dans l’art du bruitage. Il a parcouru toutes les aires où sa science empirique des rythmes et des sons pouvait s’accomplir : la musique contemporaine (Berio, Stockhausen, Xenakis, Aperghis, etc.), la danse (avec les chorégraphes Brigitte Lefèvre, Jean-Claude Gallota, Stéphanie Aubin et François Verret ), le théâtre, le jazz (il est aussi batteur), le music-hall burlesque, la musique improvisée ou expérimentale, les musiques de scène… Qu’il œuvre avec les Percussions de Strasbourg ou le percussionniste africain Adama Dramé, Jean-Pierre Drouet manifeste un savoir protéiforme qui se décline en une langue universelle. Crépitements, frottements et bruissements des percussions, sifflements auxquels se mêlent des raclements vocaux, les sons qu’il produit depuis sa table (à l’aide de chaînes, de baguettes, de lames, de pierres détournées, etc.) ou qu’il puise dans son inépuisable collection d’instruments sont d’une infinie variété. Verre, pierre, fer, peau, bois, toutes les matières grincent ou chantent entre ses mains. Naturelles ou fabriquées comme les machineries de Claudine Brahem, les sonorités organiques du quotidien sont détournées ou transposées jusqu’à s’en trouver métamorphosées. Son corps tout entier devient « machine à musique » dans une performance improvisée et théâtralisée aussi visuelle que sonore. Dans le jazz, on le retrouve logiquement aux côtés des musiciens héritiers de l’hyper-expressivité du free jazz, sensibles à la « naïveté » des folklores et attentifs aux « textures sonores » : Michel Portal, Louis Sclavis, Henri Texier, Claude Barthélemy, Fred Frith, Marc Ducret… Compositeur, Jean-Pierre Drouet est l’auteur de pièces répétitives où l’humour le dispute à la poésie.