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Sérénade n° 10 « Gran Partita » Wolfgang Amadeus Mozart
Carte d’identité de l’œuvre : Sérénade n° 10 en si bémol majeur « Gran Partita » K. 361, de Wolfgang Amadeus Mozart |
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Genre | musique pour ensemble instrumental |
Composition | date indéfinie, possiblement vers 1784, à Vienne |
Création | le 23 mars 1784 au Burgtheater à Vienne, par Anton Stadler à la clarinette |
Forme | sérénade en sept mouvements : I. Largo - Molto allegro II. Menuetto – Trios I et II III. Adagio IV. Menuetto (Allegretto) – Trios I et II V. Romance (Adagio - Allegretto) VI. Tema con variazioni (Andante – Adagio – Allegro) VII. Finale (Molto allegro) |
Instrumentation | 13 instruments : 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors, 2 cors d’harmonie, 2 cors de basset, 1 contrebasse |
Une sérénade
La sérénade est une musique de divertissement que l’on joue à la nuit tombée, les soirs d’été. Elle est à l’initiative d’un commanditaire et destinée à être jouée lors d’un événement particulier. C’est le cas par exemple de la Sérénade n° 11 en mi bémol majeur, K. 375, créée le jour de la fête de Sainte Thérèse, le 15 octobre 1781. Auteur de treize sérénades (dont trois pour vents), Mozart, de même que Haydn, fait de ce genre un lieu privilégié d’innovations (dans le domaine de la forme, de l’écriture ou de l’instrumentation).
Contexte de composition
Hormis sa date de créationL’œuvre est mentionnée pour la première fois à l’occasion d’un gala de bienfaisance organisé par le clarinettiste Anton Stadler le 23 mars 1784 à Vienne : 23 mars 1784. Concert. Herr Stadler, senior, au service de sa Majesté l’Empereur, donnera ce soir un concert pour son propre bénéfice au Théâtre de la cour impériale lors duquel sera donnée […] une grande pièce pour vents d’un genre très spécial composée par Herr Mozart !
(extrait du journal autrichien Wienerblättchen)., on ne connait de la Gran Partita ni sa destination, ni même sa date de composition et ce à trois ans près, entre 1781 et 1784, ce qui dans le cas de Mozart est considérable. Pour quelle occasion Mozart l’a-t-il écrite ? Lui-même n’en dit rien dans sa correspondance, pas plus qu’il ne la mentionne dans le catalogue thématique qu’il inaugure en février 1784, regroupant toutes ses compositions depuis cette date jusqu’à sa mort. C’est ce qui incite à situer la composition de la Gran Partita avant 1784. Par ailleurs, l’effectif instrumental correspond à une amplification de l’Harmonie Royale et ImpérialeCette harmonie est constituée de 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 cors et 2 bassons. Pour sa sérénade, Mozart y a ajouté 2 cors d’harmonie, 2 cors de basset et 1 contrebasse. créée par l’empereur Joseph II en 1782. On peut donc supposer que la composition de cette sérénade est alors postérieure à cette création. Quant au manuscrit, ni le titre, ni la date qui y figurent ne sont de lui.
Une œuvre d’exception
D’une simple sérénade, Mozart fait de la Gran partita une œuvre digne des genres les plus nobles de son temps. À l’opéra, elle emprunte l’art du chant et la tension dramatique ; à la symphonie, le sérieux du propos et la puissance orchestrale. Tout y fait exception : le nombre de musiciens, sa durée (environ 50 minutes), sa joie grave, son instrumentation si nouvelle et surtout cet irrésistible vent de liberté qui y souffle de part en part. Au cours des sept mouvements, Mozart varie les formes (forme sonate, forme ternaire, menuet à deux trios, thème et variations, rondo) et s’affranchit du cadre régulier des musiques de danse, grâce à l’emploi des syncopes, contretemps et carrures impaires. En mettant à l’honneur la clarinette, ce nouvel instrument de l’Allemagne, il s’éloigne de la sérénade à la française qui tend à privilégier le hautbois. Même le menuet, la danse versaillaise si prisée à Vienne, se germanise : tragique, dans la légèreté. Enfin, niché au cœur de l’œuvre, l’Adagio est l’un des plus beaux de Mozart. Tel un chant sans paroles, d’une pure poésie, sa voix s’élève, portée par des strates de temps différents : un flux immuable et un dessin haletant, comme un cœur qui bat.
Dans son ensemble, cette sérénade s’inscrit dans le style galant, caractérisé par l’utilisation prédominante de la mélodie accompagnée (confiée alternativement aux différents instruments). Mais chacun des mouvements possède également des éléments remarquables, que ce soit au niveau de la forme, du rythme ou encore du timbre instrumental. En voici quelques exemples :
I. Largo - Molto allegro : de forme sonate, ce mouvement débute par une introduction lente. Celle-ci se rapproche des ouvertures à la française à travers ses rythmes pointés, mais s’en éloigne par le caractère libre et improvisé de la ligne mélodique (évoquant un récitatif d’opéra). On perçoit nettement l’influence de Haydn dans le travail motivique des thèmes.
II. Menuetto – Trios I et II : inédit dans sa forme de menuet à double trio, ce mouvement rompt avec le rythme de danse par ses carrures irrégulières. L’instrumentation du Trio I, un quatuor de clarinettes et cors de basset, est pour le moins originale.
III. Adagio : de forme ABA’, traditionnelle pour un mouvement lent, cet Adagio jour sur un effet de mélodie continue grâce à l’entrée en tuilage des instruments, évoluant sur un ostinato rythmique.
IV. Menuetto (Allegretto) – Trios I et II : à nouveau, Mozart utilise la forme originale de menuet à double trio. Le caractère populaire du Trio II évoque un ländlerDanse traditionnelle originaire de la haute Autriche..
V. Romance (Adagio - Allegretto) : de forme libre, ce mouvement se distingue surtout par le rôle de soliste accordé dans l’allegretto aux cors de basset, dialoguant avec le tutti.
VI. Tema con variazioni (Andante – Adagio – Allegro) : dans ce mouvement en forme de thème et variations, Mozart reprend le thème du mouvement lent du Quatuor avec flûte en ut majeur K. 285b.
VII. Finale (Molto allegro) : le thème de ce rondo final rappelle la Sonate à quatre mains K. 19d. Notons que, contrairement à la forme traditionnelle du rondo, le refrain n’est pas systématiquement inséré entre les couplets.
Auteure : Laetitia Chassain