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Un peu d’histoire sur les Ballets russes
La Russie à la mode...
À la fin du XIXe siècle, les échanges culturels entre France et Russie se resserrent, conséquence d’un rapprochement politique spectaculaire. En 1888, la France s’endette à travers le célèbre emprunt russe, pour aider le vieil empire à se moderniser. Mais c’est surtout l’accord de coopération militaire signé entre Russie et France, en 1892, qui scelle une alliance durable entre les deux pays, du moins jusqu’à la chute du régime tsariste en 1917. Les visites officielles se multiplient. En 1896, le tsar Nicolas II pose à Paris la première pierre du pont Alexandre IIIinauguré lors de l'Exposition universelle de 1900, en hommage à son père, et revient en France en 1901 et 1909. Ce rapprochement diplomatique donne lieu à des fêtes somptueusesdurant l'année 1893 en particulier qui mettent la Russie à la mode. Le public occidental découvre avec fascination un continent entier qui demeure encore un pays lointain, exotique, entre Grand Nord et Orient.
La musique russe en France, avant les Ballets russes
Des concerts de musique joués lors des grandes expositions universelles parisiennesde 1878, 1889, 1900 ont déjà fait connaître au public le répertoire de la musique russe. Tchaïkovski est connu dès les années 1870-1880, et Rimski-Korsakov dirige à Paris des concerts où sont entendues les œuvres du groupe des CinqLe groupe des Cinq est composé des compositeurs Nicolaï Rimski-Korsakov, Alexandre Borodine, Modeste Moussorgski, César Cui, groupés autour de Mili Balakirev.. Cette musique plaît par son langage qui apporte des parfums venus d’ailleurs, et les compositeurs occidentaux s’en inspirent. Des œuvres comme les Danses polovtsiennes extraites du Prince Igor de Borodine et Shéhérazade de Rimski-Korsakov sont connues du public bien avant l’arrivée des Ballets russes.
Les Ballets russes
Serge Diaghilev (1872-1929) est le véritable fondateur de la compagnie des Ballets russes pour lesquels il organise chaque année des tournées en Europe, de 1909 à sa mort, en 1929. Il choisit avec soin les œuvres musicales qu’il veut montrer au public occidental : il connaît le désir d’exotisme de celui-ci et veut garantir le succès commercial de son entreprise. Il commence d’abord par une exposition rétrospective d’art russe, au Grand Palais, en 1906, puis poursuit en 1907 au Palais Garnier par cinq grands concerts historiques russes. En 1908, il présente l’opéra Boris Godounov de Moussorgski, avant de se tourner, l’année suivante, vers la représentation de ballets sur des musiques russes. C’est en 1909 au théâtre du Châtelet, que la troupe d’artistes qu’il a constituée sous le nom de Ballets russes se produit pour la première fois, avec un immense succès, avant de parcourir l’Europe ou le continent américain, chaque année jusqu’en 1929.
La rencontre entre les arts
Diaghilev réunit avec flair pour ses ballets une équipe d’artistes russes talentueux, tant pour la chorégraphie (comme les danseurs Mikhail Fokine et Vaclav Nijinski) que pour les décors et les costumes (comme les peintres et décorateurs Léon Bakst et Alexandre Benois). L’équipe des Ballets russes crée ainsi à chaque représentation un véritable chef-d’œuvre d’art total, fusionnant la danse, la musique et le décor : lorsque je produis un ballet, je ne perds pas de vue un seul instant aucun de ces trois facteurs
(Serge Diaghilev).
L’évolution des Ballets russes
Les œuvres généralement les plus appréciées par le public sont celles qui présentent un caractère nettement « oriental » ou « russe ». Les Danses polovtsiennes de Borodine, L’Oiseau de feu de Stravinski et Shéhérazade de Rimski-Korsakov comptent ainsi parmi les œuvres les plus applaudies par le public français, et à ce titre les plus représentées par la compagnie des Ballets russes.
C’est au public parisien, moins conservateur, que Diaghilev réserve les audaces : ainsi, ce n’est que plus tardivement qu’il donne à Londres ou à Berlin certaines œuvres de Stravinski. Le Sacre du printemps, composé par Stravinski pour Diaghilev et créé en 1913 dans le tout nouveau théâtre des Champs-Élysées, demeure l’œuvre emblématique des Ballets russes et de la modernité en ce début du XXe siècle. Après une première série de représentations sur des musiques russes, Diaghilev décide rapidement de passer commande à des artistes non russes. Attentif aux nouveautés et à la modernité, il fait appel avec audace à de nombreux compositeurs de son temps tels Satie (Parade, 1917 ; Jack in the Box, 1926), Ravel (Daphnis et Chloé, 1912), Debussy (Prélude à l’après-midi d’un faune, 1912 ; Jeux, 1913), Poulenc (Les Biches, 1924) ou encore à des peintres comme Picasso, Matisse, Chirico, Miro…
Auteurs : Bruno Guilois et Pierre Albert Castanet