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La Mer Claude Debussy
Carte d’identité de l’œuvre : La Mer de Claude Debussy |
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Genre | musique symphonique |
Composition | entre 1903 et 1905 |
Création | le 15 octobre 1905 à Paris, par les Concerts Lamoureux sous la direction de Camille Chevillard |
Forme | trois esquisses symphoniques : I. De l’aube à midi sur la mer II. Jeux de vagues III. Dialogue du vent et de la mer |
Instrumentation | bois : 1 piccolo, 2 flûtes, 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes, 3 bassons, 1 contrebasson cuivres : 4 cors, 3 trompettes, 2 cornets, 3 trombones, 1 tuba percussions : timbales, cymbales, triangle, grosse caisse, tam-tam, glockenspiel cordes pincées : 2 harpes cordes frottées : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Genèse de l’œuvre
Vous ne savez peut-être pas que j’étais promis à la belle carrière de marin, et que seuls les hasards de l’existence m’ont fait bifurquer. Néanmoins j’ai conservé une passion sincère pour Elle. Vous me direz à cela que l’Océan ne baigne pas précisément les coteaux bourguignons… ! […] Mais j’ai d’innombrables souvenirs ; cela vaut mieux en mon sens, qu’une réalité dont le charme pèse généralement trop lourd sur votre pensée.
Commentaire de Claude Debussy à André Messager, septembre 1903 (Claude Debussy, F. Lesure, éditions Fayard, 2003, p. 245).
Debussy a toujours eu un attrait particulier pour la mer et l’océan, depuis qu’enfant il a découvert les lumières de la Méditerranée chez sa tante à Cannes. Mais c’est la Manche et l’océan Atlantique qu’il aime par-dessus tout. Pourtant, il passe effectivement l’été en Bourgogne quand il entreprend de composer La Mer. Et, chose rare, il ne met que… un an et demi pour achever cet ensemble de trois « esquisses symphoniques ». C’est très peu en comparaison par exemple avec les sept années qui lui sont nécessaires pour composer ses cahiers d’Images. Claude Debussy est alors devenu un artiste reconnu, qui fait référence dans le monde musical. Il est également un critique important. En janvier de cette même année 1903, il a été nommé chevalier de la Légion d’honneur.
Entre 1903 et 1905, Debussy connaît un grand bouleversement affectif : alors qu’il est marié à Rosalie Texier, il tombe éperdument amoureux d’Emma Bardac, elle-même mariée. En 1904, ils décident de s’enfuir ensemble sur l’île de Jersey. En 1905, les deux amants obtiennent chacun le divorce et, le 30 octobre, une petite fille naît de cette nouvelle union, Claude-Emma. Le même mois est créée La Mer, exécutée le 15 octobre par les Concerts Lamoureux. Une fois encore, et malgré les succès antérieurs de Debussy, la plupart des critiques se méprennent sur l’œuvre et l’accueillent plus que froidement. On trouve malgré tout quelques commentaires clairvoyants comme ceux de MarnoldExtraits de Claude Debussy, F. Lesure, éditions Fayard, mai 2003, p. 275-276. Co-fondateur du Mercure musical, Marnold (1859-1835) est un critique et grand défenseur de Maurice Ravel. qui parle de polyphonie prestigieuse
, de pages où l’on croit côtoyer des abîmes et discerner jusqu’au fond de l’espace
et d’un orchestre aux sonorités insoupçonnables.
Esquisses symphoniques
Autant que la mer, la peinture a toujours attiré Debussy. Tout petit, il a reçu en cadeau une palette de peintre qu’il a conservée jusqu’à son divorce d’avec Rosalie Texier. Il confie même une fois à ses amis qu’il aurait aimé avoir travaillé la peinture au lieu de la musique
Claude Debussy, F. Lesure, éditions Fayard, mai 2003, p. 434. Le mot « esquisses » rappelle l’art pictural. Mais La Mer se rapproche d’une symphonie au langage moderne employé par Debussy. L’orchestre lui offre une palette de timbres dans laquelle il peut puiser à la manière d’un peintre.
De l’aube à midi sur la mer
C’est la lumière sur la mer qui inspire ce premier mouvement, allant de l’instant qui précède le lever du jour au rayonnant soleil de midi. Claude Debussy divise ce mouvement en deux parties, encadrées par une introduction et une codaLe terme signifie « queue » en latin ; en musique, il désigne la partie terminale d’une pièce.. De la lente introduction, où la musique s’éveille progressivement, émerge un thème à la trompette en sourdinesorte de « bouchon » qui se met dans le pavillon des cuivres pour assourdir le son, doublée par le cor anglais. Ce thème cyclique réapparaît dans la suite du mouvement en subissant des transformations. On le retrouvera plus tard dans le troisième mouvement.
Debussy fait ensuite s’enchaîner les deux parties centrales. Toutes deux s’animent et traduisent différents scintillements, reflets ou autres jeux de lumière pour revenir au presque silence. Dans la première, un second thème apparaît joué par les quatre cors en sourdine. Il est interprété à de nombreuses reprises, provoquant à chaque fois une nouvelle « réaction » de l’orchestre.
La deuxième partie est plus rythmée, va plus loin dans la nuance, et renforce l’effet de luminosité croissante. Dans la coda qui conclut ce mouvement, un puissant crescendo amène une éblouissante mélodie des cuivres doublée du timbre brillant des cymbales et du tam-taminstrument proche du gong.
Jeux de vagues
Ce mouvement à trois temps pourrait être le scherzomouvement léger et divertissant placé en deuxième ou troisième position dans les mouvements d’une symphonie et qui remplace, à l’époque romantique, le menuet classique d’une symphonie. Dans une première partie, Debussy expose une succession de thèmes variés comme entendus à travers un prisme, un kaléidoscope musical. Il joue une fois encore en virtuose des timbres instrumentaux, pour nous donner par exemple l’impression qu’une vague traverse l’orchestre. Les motifs sont ensuite repris et transformés au cours d’un développement qui va en s’animant. Les incessantes fluctuations de tempo forment une succession d’épisodes évoquant les jeux des vagues.
Dialogue du vent et de la mer
Ce dernier mouvement est le plus théâtral des trois. Il commence par une introduction, indiquée « animé et tumultueux », dans laquelle le thème cyclique du premier mouvement refait son apparition. Puis le mouvement prend la forme d’un rondoforme de type refrain-couplets, autrement dit de type ABACA : le refrain, le thème du vent, alterne avec des couplets dans lesquels vient s’immiscer le thème cyclique.
Debussy crée une scène parfois proche du chaos : mouvements mélodiques qui se soulèvent du grave de l’orchestre pour redescendre, nombreux crescendo-decrescendonuance qui consiste à enfler le volume sonore de l’orchestre puis à le baisser, et impressionnants effets de percussions. Il amplifie d’ailleurs l’orchestre en ajoutant la grosse caisse aux percussions et deux cornets à pistonsinstruments proches des trompettes aux cuivres, et lui donne plus de profondeur sonore en ajoutant un contrebasson au pupitre des bois. Le mouvement général de cette dernière esquisse, même s’il rencontre des accalmies, va en s’amplifiant : le dernier refrain, qui commence dans la nuance piano, monte en crescendo et le mouvement se conclut dans une magistrale nuance triple-forte.
Auteure : Aurélie Loyer
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Morceaux choisis : la mer
Une sélection par le détail d’œuvres du Musée de la musique sur le thème de la mer.