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Symphonie n° 3 « Rhénane » Robert Schumann
Carte d’identité de l’œuvre : Symphonie n° 3 « Rhénane » de Robert Schumann |
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Genre | musique symphonique |
Composition | entre novembre et décembre 1850, à Düsseldorf |
Création | le 6 février 1851 à Düsseldorf, sous la direction du compositeur |
Forme | symphonie en cinq mouvements : I. Lebhaft II. Scherzo - Sehr mässig III. Nicht schnell IV. Feierlich V. Lebhaft |
Instrumentation | bois : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons cuivres : 4 cors, 2 trompettes, 3 trombones percussions : timbales cordes : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Contexte de composition et de création
À l’automne 1850, Schumann quitte enfin Dresde qu’il n’appréciait guèreNous ne resterons à Dresde pour rien au monde, nous nous ennuyons horriblement… pas un seul musicien à voir
, écrit Clara dans le journal conjugal. et s’installe à Düsseldorf. Là, il succède à son ami Ferdinand Hiller à la direction de l’orchestre de la ville. C'est un vrai plaisir pour le compositeur d’aborder les rives du Rhin, ce fleuve pour lequel il ressent une profonde attirance depuis l’enfance. Et Düsseldorf le lui rend bien : fière de recevoir le célèbre couple SchumannClara, la femme de Schumann, est également une pianiste virtuose renommée., la ville lui réserve un accueil chaleureux. Schumann, assailli depuis plusieurs années par des troubles nerveux, retrouve un peu de sérénité dans l'environnement amical et bienveillant de la Basse-Rhénanie, et se met à composer rapidement. Sa Symphonie n° 3En réalité, la Symphonie n° 4 est composée avant la Symphonie n° 3. Mais la numérotation suit la chronologie de l'édition et non celle de la composition. voit le jour en quelques semaines, entre novembre et décembre 1850. Elle est créée le 6 février 1851 à Düsseldorf, sous la direction du compositeur. C’est un tel succès qu’elle y sera redonnée le 13 mars, après une représentation à Cologne le 25 février.
Le surnom « rhénane » n’est pas explicitement de Schumann. L’œuvre doit cette appellation au sous-titre initialement prévu : « Épisode d’une vie sur les bords du Rhin ». Mais par la suite, le compositeur préfère supprimer toute référence extra-musicale, étant d’avis qu’il vaut mieux que l’impression générale se dégage d’elle-même
. Les mouvements n’ont donc pas d’autre titre que leur indication de tempo ou de caractère, en allemand (Schumann abandonnant la terminologie italienne utilisée habituellement). Néanmoins, on peut malgré tout voir dans la Symphonie n° 3 une évocation de la vie au bord du fleuve. Touché par l’accueil de la ville de Düsseldorf, enthousiasmé par son tout nouveau rôle de chef d’orchestre, Schumann exprime à travers cette œuvre toute sa reconnaissance et sa joie, tandis qu’il envisage alors l’avenir avec confiance.
Déroulé de l'œuvre
En cinq mouvements, la Symphonie n° 3 de Schumann s’inscrit dans la lignée de la Symphonie n° 6 « Pastorale » (1808) de Beethoven et de la Symphonie fantastique (1830) de Berlioz.
Le premier mouvement, de forme sonateLa forme sonate est une forme en trois parties : une exposition énonçant (en général) deux thèmes contrastés, un développement construit autour de ces thèmes, et enfin une réexposition., est énergique et brillant. Il plonge immédiatement l’auditeur dans l’atmosphère chaleureuse de la Basse-Rhénanie. Le premier thème, joué tuttipar tout l’orchestre, est rythmé par les syncopesUne syncope est une note attaquée sur un temps faible (ou la partie faible d'un temps) et qui se prolonge sur le temps suivant. Brahms réutilisera cette rythmique au début de sa propre Symphonie n° 3. qui lui donnent de l’élan. Il contraste avec le deuxième thème plus lyrique, d’abord énoncé par les bois.
Le deuxième mouvement, à l'origine intitulé « Matinée sur le Rhin », est noté « scherzo » mais n’en pas la forme habituellescherzo-trio-reprise du scherzo. Il se rapproche plutôt d’une suite de variations autour d’un thème populaire, dans le caractère d’un ländlerdanse traditionnelle à trois temps, originaire de Haute-Autriche et populaire en Allemagne., énoncé au début par les cordes basses (altos et violoncelles) et les bassons. Au centre du mouvement, un passage plus plaintif (en mineur) peut s’apparenter à l’habituel trio : il contraste par son orchestration réduite dominée par les bois et les cors.
Le troisième mouvement, très court (56 mesures), joue le rôle de transition entre les deuxième et quatrième mouvements. Il fait entendre deux idées thématiques différentes qui alternent : une première idée douce (indiquée dolce) mais légère, avec ses notes courtes et détachées (notes piquées), et une deuxième idée plus liée.
Le quatrième mouvement est un majestueux choralÀ l’origine vocal, le choral est un genre polyphonique en général à 4 voix, écrit dans un style homorythmique (toutes les voix suivent le même rythme)., énoncé au début par les cuivres. Il est ensuite travaillé en contrepointLe contrepoint est l'art d'agencer entre elles des lignes mélodiques autonomes, de manière harmonieuse. dans un style qui rappelle certaines œuvres de Johann Sebastian Bach.
Le dernier mouvement clôt joyeusement la symphonie. De forme sonate comme le premier mouvement, ses thèmes sont très dansants, marqués par des accents et rythmés de syncopes. On y entend à nouveau le choral du mouvement précédent.
Focus sur le mouvement IV. Feierlich
À l’origine, Schumann avait sous-titré ce mouvement dans le caractère de l’accompagnement d’une cérémonie solennelle
. Le compositeur aurait été inspiré par la cérémonie d’élévation au rang de cardinal de l’archevêque de Cologne, le 12 novembre 1850. Cependant, d’après son journal, il n’était pas présent ce jour-là. En revanche, le 29 septembre précédent, les Schumann ont bel et bien effectué un séjour dans la ville, où ils ont été fortement impressionnés par la cathédrale. Sans doute Schumann a-t-il toujours en mémoire ce monument grandiose lorsqu’il compose le quatrième mouvement de sa symphonie.
Le mouvement débute avec un majestueux choral de cuivres aux trombones (qui interviennent pour la première fois depuis le début de l’œuvre) et aux cors. Sobrement accompagné par les cordes en pizzicatoen pinçant les cordes et dans une tonalité mineure, il amène d’emblée la gravité et la solennité requise dans le titre« Feierlich » signifie « solennellement ».. Tout le mouvement est construit autour de ce choral. Il est repris de manière fuguée par tout l'orchestre, d'abord de façon très dense avec des entrées très rapprochée. Puis, il est développé plus lentement tandis que la tête du thème seule (les sept premières notes), jouée en diminutionLe thème est joué selon des valeurs rythmiques plus courtes, tout en croches., passe rapidement d’une voix à l’autre. La codapartie conclusive fait entendre des accords majestueux et fortissimo des cuivres et bois, plus joyeux et lumineux (en majeur cette fois), suivis d’une réminiscence du choral dans la nuance pianissimo.
Auteur : Floriane Goubault