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1784 : une année faste dans la vie de Mozart
En 1784, voilà trois ans que Mozart s’est installé à Vienne après la rupture avec son employeur, l’archevêque de Salzbourg Colloredo. Trois années riches de succès pour le jeune compositeur qui voit son avenir se profiler sous des auspices favorables. Dans le domaine musical, il remporte l’adhésion du public viennois et de l’empereur Joseph II grâce à son singspielÉquivalent de l'opéra-comique français, le singspiel est un genre d'opéra mêlant chants et dialogues parlés. L’Enlèvement au sérail créé le 16 juillet 1782. Sa vie personnelle s’annonce tout aussi brillante depuis son mariage avec Constance le 4 août 1782. Confiant et serein, Mozart commence l’année 1784 en emménageant dès janvier dans un très bel appartement sur le Graben, une importante rue du centre-ville de Vienne. Et les premiers mois montrent déjà une intense activité de la part du compositeur : il commence le catalogue thématique de ses œuvres, donne une vingtaine de concerts, enchaîne les compositions (dont quatre concertos pour piano)... 1784 sera également l’année de son entrée dans la franc-maçonnerie, quelques semaines avant celle de son grand ami, le compositeur Joseph Haydn.
L'ami, « papa » Haydn
J’enrage que cet homme ne soit pas encore engagé en une cour impériale ou royale. Pardonnez-moi si je déraille ainsi, mais j’ai tant d’affection pour cet homme !
Haydn à propos de Mozart, 1787.
1784 scelle aussi la plus belle amitié de l’histoire de la musique : celle de Haydn (1732-1809) et de Mozart. Une génération les sépare et pourtant se crée entre eux un lien indéfectible. L’hiver suivant, ils entrent tous deux dans la franc-maçonnerie et Mozart dédie bientôt à son ami six nouveaux quatuors. Ils sont le fruit de son admiration pour les Quatuors à cordes op. 33 parus trois ans plus tôt : un chef-d’oeuvre de Haydn aux innovations déconcertantes, dont le premier mouvement de la Gran Partita porte la marque. À la force assimilatrice de Mozart répond l’esprit novateur de Haydn ; à la richesse thématique de l’un, la pensée unitaire de l’autre. Je vous l’affirme devant Dieu, en honnête homme, votre fils est le plus grand compositeur que je connaisse, en personne ou de réputation
, déclare Haydn à Leopold Mozart.
La clarinette de Stadler
La Gran Partita est l’un des chefs-d’œuvre nés de l’amour de Mozart pour la clarinette et de son amitié avec le clarinettiste Anton Stadler (1753-1812). Soliste de l’orchestre du Burgtheater et membre de l’octuor impérial, Stadler est un virtuose incontesté. Au soir de la présentation de la Gran Partita, le 23 mars 1784, sa sonorité incomparable fait l’admiration de tous : Comment te dire, cher virtuose, toute ma gratitude !
, proclame le critique Johann Friedrich Schink. Jamais je n’aurais pensé qu’une clarinette puisse imiter à ce degré d’illusion la voix humaine ! En vérité, ton instrument a un timbre si doux, si charmant, que toute personne ayant un coeur – et j’en ai un – n’y peut résister !
(Litterarische Fragmente, Graz, 1785).
En outre, grâce à ses liens avec le facteur d’instruments à vent Theodor Lotz, Stadler fait découvrir à Mozart deux nouveaux instruments : le cor de basset que Mozart introduit pour la première fois dans la Gran Partita et la clarinette de basset pour laquelle il compose le célèbre Concerto en la majeur, quelques mois avant sa mort.
Auteure : Laetitia Chassain