Accueil / Fiches œuvres / Brahms - Danses hongroises
Page découverte
Danses hongroises Johannes Brahms
Carte d’identité de l’œuvre : Danses hongroises de Johannes Brahms |
|
Genre | musique de chambre |
Composition | danses n° 1 à 10 : entre 1858 et 1868 danses n° 11 à 21 : en 1880 |
Création | danses n° 1 à 10 : le 1er novembre 1868 à Oldenburg, en Allemagne danses n° 11 à 21 : le 3 mai 1880 à Mehlem, en Allemagne |
Forme | ensemble constitué de 21 danses |
Instrumentation | piano à quatre mains |
Version pour piano seul | danses n° 1 à 10 par Johannes Brahms |
Version pour violon et piano | danses n° 1 à 21 par Joseph Joachim |
Orchestrations | danses n° 1, 3 et 10 par Johannes Brahms danse n° 2 par Johan Andreas Hallén danse n° 4 par Paul Juon danses n° 5, 6 et 7 par Martin Schmeling danses n° 8 et 9 par Hans Gál danses n° 11 à 16 par Albert Parlow danses n° 17 à 21 par Antonín Dvořák |
Genèse et composition de l’œuvre
Les Danses hongroises n’ont pas de numéro d’opus car Brahms les considérait comme des arrangements d’airs populaires. Il semble cependant que les danses n° 11, 14 et 16 soient tout à fait originales.
À l’âge de 15 ans, Brahms rencontre Eduard Remenyi qui jouait des danses tziganes dans ses tournées, danses que Brahms accompagnait au piano en improvisant. Or, le succès immédiat des Danses hongroises de Brahms après leur publication suscita beaucoup de jalousie, en premier lieu de la part de Remenyi qui accusa Brahms de vol.
Les Danses hongroises : origines et adaptations
Brahms écrivit ses Danses hongroises pour piano à quatre mains avant d’en réécrire dix pour piano solo et trois pour orchestre. Les autres danses furent toutes arrangées pour orchestre par d’autres compositeurs : Andreas Hallen, Paul Juon, Martin Schmeling, Hans Gal, Albert Parlow et surtout Antonín Dvořák. L’influence de ces pièces sur ce dernier fut grande : il s’en inspira pour composer ses Danses slaves en 1878, danses également pour piano à quatre mains et éditées chez Simrock. Les danses qui ont inspiré Brahms sont des czardas (littéralement « auberges » en hongrois), des danses de coupleLes danseurs exécutent librement les pas selon leur fantaisie. Le nombre des couples est illimité. Le danseur tient la danseuse par la taille ou lui passe ses bras autour des épaules. Le couple tourne de droite à gauche ; le cavalier exécute des sauts en frappant de ses talons l’un contre l’autre tandis que la danseuse sautille, la main appuyée sur l’épaule de son partenaire.
(Pierre-Paul Lacas, « CSARDAS ou CZARDAS, danse », Encyclopædia Universalis). Les czardas alternent deux parties : lassu (« tactile »), qui est lente, en mode mineur, et frisska (« habilement »), qui est au contraire très rapide, agitée et en mode majeur. Ces czardas viennent d’Europe de l’Est, mais Brahms les a entendues interprétées à la façon des musiciens tziganes.
Les caractéristiques de la musique hongroise tzigane
Les Tziganes installés en Transylvanie (à l’époque sur les terres hongroises) sont les Rumungre. Ils ont la particularité de s’approprier les musiques qu’ils entendent dans le pays afin de pouvoir s’intégrer : c’est ainsi qu’à l’époque de Brahms, leurs musiques pouvaient être des musiques des campagnes hongroises, mais aussi des airs d’opérettes, romances, musique de salon, etc. Elles étaient toujours adaptées à leurs traditions instrumentalesL’orchestre rumungre est composé d’un violon solo et d’éventuels autres instruments à cordes frottées, accompagnés par un cymbalum, une contrebasse jouant en général en pizzicato (cordes pincées avec les doigts au lieu d’être frottées avec un archet) et une guitare sur des rythmes syncopés (notes attaquées sur un temps faible). La virtuosité se montrait surtout au violon : glissandi (faire glisser son doigt sur la corde) et ornementations à l’excès des mélodies (embellissement des mélodies, notamment grâce à l’ajout de notes non présentes au départ).. Ces musiques étaient donc improvisées (l’improvisation étant vue à la fois comme un moyen de montrer sa virtuosité mais aussi comme un symbole de la liberté de va-et-vient du peuple tzigane) et arrangées à la manière tziganemélodies très expressives avec beaucoup de nuances ; liberté harmonique avec utilisation entre autre du « mode tzigane », avec des intervalles peu usités dans la musique savante comme la sixte diminuée, la septième augmentée et surtout la quarte augmentée ; liberté rythmique avec des variations de tempo au gré du moment (rubato) ainsi que l’accentuation des éléments rythmiques (notamment avec l’usage du staccato donnant l’impression de notes sautillantes et piquées) ; liberté formelle.
Focus sur les trois premières danses
Les Danses hongroises adoptent le style des czardas : mélodies se rapprochant des couleurs tziganes, alternance des modes majeur et mineur, beaucoup de chromatismes avec l’usage d’ornements à l’extrême, sonorités proches des orchestres populaires (imitation par exemple du timbre du cymbalum, du coup d’archet du violon ou des pizzicatos de la contrebasse), changements fréquents de tempo (rubato), syncopes et accents sur les contretemps, contrastes dynamiques avec de nombreux crescendos puis decrescendos. Les formes semblent classiques (ABA’) mais ont des carrures irrégulières, avec plusieurs parties semblables à des passages improvisés.
La Danse n° 1 commence avec un Allegro Molto en mineur. Le thème, très langoureux, est issu d’une czardas de Ferenc Särkozy. Une deuxième idée, dans la même partie apporte un contraste avec celui-ci, par son aspect enjoué et son tempo rapide. La partie B arrive alors, initiée par un saut d’octave lié (comme un rapide démanché sur un violon). Elle fait entendre quelques incursions dans le mode majeur, et un poco ritenuto (ralentissement du tempo), avant le retour de la partie A en mineur dans le tempo initial.
La Danse n° 2 expose un thème emprunté au recueil Emma Csardas (Czardas d’Emma) de Mor Windt. La partie A, Allegro non assai, commence en mineur avec l’énonciation du thème con passione. La partie B, Vivo, est joyeuse et rythmée. Celle-ci, en majeur, présente plusieurs idées et variations rythmiques.
Dans la Danse n° 3, l’Allegretto commence avec une partie douce, joyeuse : c’est un thème quasi pastoral issu d’une danse nuptiale empruntée au Tolnai Lakodalmas de Rizner. Le Vivace est court, brillant et puissant. Sa première partie est le point culminant de l’œuvre. Tous les registres du piano y sont représentés simultanément sur des octaves en homorythmiemême rythme à chaque voix.
Auteure : Marie Zalczer