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Le calypso (kaiso) de Trinité-et-Tobago
Origines du calypso
Le calypso – ou kaiso – est un genre musical issu de la communauté urbaine d’origine africaine de Trinité-et-Tobago, dans les Caraïbes. Le terme peut définir une chanson de commentaire social ou le rythme caractéristique de son accompagnement instrumental. Celui-ci peut aussi servir à créoliser un morceau étranger.
Le calypso est né des chants responsoriauxProcédé d'exécution faisant alterner un soliste et un chœur. et des polyrythmiesLa polyrythmie est une musique fondée sur l'enchevêtrement de plusieurs figures rythmiques – jouées sur des instruments à hauteurs non définies – qui s'inscrivent dans la même période métrique mais dont les accents sont décalés. pratiqués aux carnavals de la fin du XIXe siècle à Port of Spain (capitale de Trinidad). Cette musique accompagnait des joutes dansées (le stickfighting« Combat de bâton ». Comme la capoeira au Brésil, il s'agit d'une danse pugilistique, c'est à dire d'une joute dansée. Les deux rivaux s'affrontent avec des bâtons sur une musique polyrythmique et des chants responsoriaux.) où les danseurs s’affrontaient avec des bâtons. Parallèlement à ces performances dont ils vont peu à peu se détacher, les solistes – appelés chantwellsdu français « chanterelle » – commencent à se produire dans un contexte de type occidental : dans des tents – des cabanons de bambous – où le public paye une participation à l’entrée. C’est le début du calypso.
Dans les tents, l’orchestration connaît un bouleversement radical : disparition des membranophonesInstrument de musique dont le son est produit par la vibration d'une membrane tendue., limitation des idiophonesInstrument de musique dont le son est produit par la vibration du corps de l'instrument (et non pas par celle d'une corde, d'une membrane ou d'un volume d'air). aux seuls shac-shacs (maracas) et adoption de cordophonesInstrument de musique dont le son est produit par la vibration d'une ou plusieurs cordes, celles-ci étant le plus souvent frottées, pincées ou frappées. (guitare, mandoline, cuatro...), puis d’aérophonesInstrument de musique dont le son est produit par la vibration d'une colonne d'air ou de l'air ambiant. européens (clarinette, saxophone...). Dans la rue les polyrythmies du carnaval favoriseront la création du pan dans les années 1930-1940.
Les paroles
En alternance avec un chœur, les calypsonians (anciennement les chantwells) s’exprimaient dans une langue très proche du créole antillais, puis adoptèrent le dialecte anglais de Trinidad. Très variés, les thèmes fournissent de riches informations sur les représentations sociales. Abordant les rapports entre les classes sociales, les sexes ou les communautés (d’origine indienne, africaine, européenne...), ils offrent un témoignage vivant, souvent satirique, de l’histoire et des mœurs du pays. Très tôt soumis à des compétitions, les calypsos furent d’ailleurs censurés par le pouvoir colonial des années 1930 à 1950.
Premières formes de calypso
Une des premières formes musicales, appelée oratorical calypso ou sans humanité, est reconnaissable à sa grille harmoniqueDans un grand nombre de musiques occidentales et dans le jazz, une grille harmonique est une succession d'accords qui accompagnent une mélodie et fondent la structure du morceau. en mode mineur et à la ritournelle du chœur « sans humanité » qui traduit le caractère à la fois belliqueux et satirique du texte. Cette forme est utilisée dans l’ex-tempore, style de calypso où deux solistes s’affrontent par une joute oratoire en improvisant des paroles qui raillent l’adversaire.
Entre les deux guerres, parallèlement à la commercialisation d’enregistrements, les calypsos évoluent : l'alternance couplet/refrain se généralise, les grilles harmoniques se diversifient et les gammes majeures se répandent.
Ces formes, même les plus anciennes, sont toujours utilisées aujourd'hui.
Récentes évolutions du calypso
Le calypso a évolué dans le sillage des musiques populaires modernes. L'instrumentation a intégré la basse et la guitare électriques, la batterie, les congas et le synthétiseur. Assez médiatisés, les calypsonians cherchent à se professionnaliser et peuvent être traités comme des stars. Ils se produisent en général dans des tents et lors de compétitions thématiques pendant la saison du carnaval. Ils chantent alors entre autres des calypsos humoristiques, politiques ou des ex-tempore.
Dans les années 1970, le calypso a aussi donné naissance à la socasouvent accompagnée d'instruments électroniques, très proche rythmiquement mais à la ligne de basse plus mélodique et au texte moins développé. Des variantes ont émergé plus récemment, telles que la chutney soca, d'influence indienne.
Calypso et steelband
Les calypsos sont volontiers repris sous leur forme couplet/refrain, par des orchestres de pans. Mais la multiplication des compétitions de steelbands a généré un besoin de compositions et a donné naissance à une nouvelle catégorie de calypso, le pan kaiso. Ces morceaux, d'abord diffusés dans leur version chantée, sont ensuite repris dans les compétitions où ils sont enrichis de nombreuses variations instrumentales.
Le rythme et l'orchestration type du calypso sont aussi utilisés par les steelbands pour créoliser des morceaux non calypso. Ces pièces sont appelées bomp tune.
Auteure : Aurélie Helmlinger