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Les Créatures de ProméthéeLudwig van Beethoven
Carte d’identité de l’œuvre : Les Créatures de Prométhée de Ludwig van Beethoven |
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Genre | ballet |
Argument | Salvatore Viganò |
Composition | en 1800-1801 |
Dédicataire | la princesse Christiane von Lichnowsky |
Création | le 28 mars 1801 au Burgtheater de Vienne |
Forme | une Ouverture - Introduction et deux actes |
Instrumentation | bois : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 1 cor de basset, 2 bassons cuivres : 2 cors, 2 trompettes percussions : timbales cordes pincées : 1 harpe cordes frottées : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Contexte de composition et de création
Lorsque le chorégraphe Salvatore Viganò fait appel à Beethoven pour composer la musique d’un ballet, ce dernier est un compositeur et pianiste déjà bien établi à Vienne. Sa Symphonie n° 1 a été créée en 1800, il a achevé la composition des Quatuors op. 18 et entame la composition d’une deuxième symphonie. Le ballet Les Créatures de Prométhée sera créé le 28 mars 1801 et recevra un accueil suffisamment favorable pour que 28 représentations soient assurées. Il s’agit de la première musique de scène de Beethoven. Le livret, perdu, évoque comment Prométhée, ayant dérobé le feu aux dieux, donne vie à deux statues en argile qu’il a modelées.
À l’époque de la composition du ballet, Beethoven, sensible aux idées révolutionnaires, accueille avec enthousiasme l’arrivée au pouvoir de Bonaparte, qui semble vouloir les répandre en Europe. Déjà en 1797, dans son poème Il Prometeo, Vincenzo Monti présentait le général français comme le nouveau Prométhée, libérateur de l’humanité. Ainsi, le mythe de Prométhée revêt une importance particulière pour le compositeur car il rend hommage à celui qui semble alors être le héros de la Révolution.
Cependant, ces années de composition sont également marquées par l’arrivée de la surdité du compositeur. S’il n’a pas encore complètement perdu l’espoir de guérir, il ne peut assumer ce handicap en société. En 1801, il avoue dans une lettre à son ami Wegeler : Tu peux à peine croire quelle vie de solitude et de tristesse j’ai menée depuis deux ans. Mon infirmité se dressait partout devant moi, comme un spectre, et je fuyais les hommes.
Mais il affirme se sentir investi d’une mission, lui donnant la force de poursuivre la composition et de continuer à vivre. À travers le mythe de Prométhée, il s’identifie lui-même au titan, insufflant la vie et apportant la connaissance aux hommes en dépit du supplice auquel il est soumis (rappelant le supplice de Prométhée voué à se faire chaque jour dévorer le foie par un aigle).
Langage musical
Le ballet Les Créatures de Prométhée est encore ancré dans l’héritage du classicisme avec un orchestre proche de celui de Mozart et de Haydn. Mais Beethoven commence à renouveler certains aspects de l’écriture, jouant avec les timbres pour la dramaturgie de l’œuvre : importance grandissante des vents comme dans la Pastorale (n° 10), roulements de timbale et orchestre à l’unisson dans la Tempesta (Introduction), ouverture par des appels de timbale puis de cuivres dans l’Allegro con brio (n° 8), thème au hautbois accompagné par des trémolos aux cordes (n° 9), solo de cor de basset (n° 14).
Le Finale du ballet (n° 16) s’ouvre sur le thème de Prométhée, une mélodie et sa ligne de basse identifiées au héros. Beethoven les réutilisera dans deux autres œuvres : le dernier mouvement de la Symphonie n° 3 et les Quinze Variations op. 35 pour piano.
Zoom sur l’Ouverture et l’Introduction
Ouverture
L’Ouverture du ballet s’inscrit dans la tradition de la musique de scène. L’orchestre ouvre l’œuvre par de grands accords imitant les trois coups du théâtre pour le lever de rideau. Une section lente, Adagio, donne à entendre un thème lyrique.
Soudain, l’Allegro molto con brio jaillit dans une grande agitation et expose deux thèmes. Le premier, joué par les violons, tourne sur lui-même dans un continuum de notes rapides ininterrompues, rappelant Les Noces de Figaro de Mozart et préfigurant les ouvertures de Rossini. Des syncopes, amplifiées par des souffletseffet de nuance crescendo-decrescendo, viennent s’ajouter, renforçant la fébrilité du mouvement.
Le deuxième thème, plus léger, est un jeu de dialogue entre les bois puis avec les cordes.
Mais le drame n’est pas loin, et Beethoven l’annonce par de grands accords fortissimo alternant avec des passages piano.
La réexposition des thèmes est aussi bousculée, le premier thème étant interrompu et repris en mineur.
La coda (partie conclusive) est marquée par l’accumulation de motifs issus des deux thèmes, terminant cette ouverture de manière brillante.
Introduction
L’Introduction est directement enchaînée avec l’Ouverture. Elle débute par une première partie mystérieuse : d’abord des batteries aux cordes, alternées avec des notes répétées piquées et accompagnées par des tenues aux cors et bassons, puis un thème énoncé par les cordes à l’unisson construit sur la répétition entêtée d’un motif mettant en valeur une quinte diminuée, intervalle instable. Un roulement de timbale pianissimo, annonçant la tempête, est interrompu par des éclats de l’orchestre sforzandos.
Le premier thème revient amplifié par les flûtes et les bassons, en un crescendo qui amène à une deuxième partie, plus tourmentée, faisant entendre de grands arpèges fortissimo. Enfin, la tempête semble s’éloigner grâce à un decrescendo et un apaisement général de l’orchestre.
Ce mouvement annonce l’orage du quatrième mouvement de la Symphonie n° 6 « Pastorale ». Celui-ci fera appel à un orchestre déjà plus développé, et Beethoven ira encore plus loin dans les jeux de timbre de l’orchestre pour imiter une nature déchaînée.
Auteure : Adèle Gornet