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Les Illuminations op. 18 Benjamin Britten
Carte d’identité de l’œuvre : Les Illuminations op. 18 de Benjamin Britten |
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Genre | musique vocale : mélodie |
Texte | poèmes extraits du recueil Les Illuminations d’Arthur Rimbaud |
Composition | en 1939 aux États-Unis |
Dédicace | « For Sophie Wyss » |
Création | le 30 janvier 1940 à Londres, par Sophie Wyss (soprano) et le Boyd Neel orchestra, sous la direction de Boyd Neel |
Forme | cycle de dix mélodies, en neuf parties : 1. Fanfare 2. Villes 3a. Phrase - 3b. Antique 4. Royauté 5. Marine 6. Interlude 7. Being Beauteous 8. Parade 9. Départ |
Instrumentation | voix soliste : soprano ou ténor orchestre à cordes : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Contexte de composition et de création
Les Illuminations constitue un cycle de mélodies pour voix aiguë (ténor ou soprano) sur des poèmes en prose tirés du recueil éponyme d’Arthur Rimbaud. Bien qu’anglais, Britten a déjà composé sur de la poésie française : en 1928, il a écrit Quatre Chansons françaises sur des poèmes de Victor Hugo et Paul Verlaine.
Lors de la composition des Illuminations, Britten vient de s’exiler aux États-Unis. L’œuvre est pourtant créée à Londres le 30 janvier 1940, avec la soprano Sophie Wyss et le Boyd Neel orchestra dirigé par Boyd Neel.
Le cycle Les Illuminations se compose de dix mélodies : 1. Fanfare, 2. Villes, 3a. Phrase et 3b. Antique, 4. Royauté, 5. Marine, 6. Interlude, 7. Being Beauteous, 8. Parade et 9. Départ.
Focus sur quelques mélodies du recueil
1. Fanfare
Drôle d’idée que d’annoncer une fanfare lorsque l’orchestre qui joue le morceau ne possède aucun instrument à vent ! C’est là le génie de Benjamin Britten. Car nous entendons bien la fanfare. Ce sont les altos et premiers violons qui l’entonnent, en jouant de brillants accords majeurs arpégésLes notes de l’accord sont jouées l’une après l’autre plutôt que toutes en même temps., sur un ton décidé, avec des notes accentuées et dans une nuance fortissimo. Britten demande d’ailleurs « quasi trombe » c’est-à-dire, « presque des trompettes ».
Le reste de l’orchestre fait entendre un grondement de trilles et de trémolos, tout d’abord très discret, puis de plus en plus fort, jusqu’à l’éclatement de la voix. J’ai seul la clé de cette parade sauvage
déclare-t-elle dans une nuance fortissimo. Le texte n’est pas mis en valeur par une mélodie chantante, mais par une véritable déclamation sur une même note, dans le médium aigu. Un violon solo vient conclure cette courte intervention, mais à la différence de la voix, il chante doucement, soutenu par le reste de l’orchestre en harmoniquesnotes réalisées en effleurant le doigt sur les cordes, ce qui rend la sonorité très douce, presque cristalline, rendant l’ambiance presque transparente.
3b. Antique
Deux ambiances se superposent dans ce morceau. Tout d’abord, les altos et violoncelles se font guitares« quasi chitarra » comme le désire Britten, marquant les temps par de délicats pizzicatosnotes jouées sans l’archet, en pinçant les cordes avec le doigt soutenus de temps à autre par les contrebasses. Au-dessus de ces « guitares », la voix et le premier violon solo entament un véritable duo très expressif, dans lequel la musique se met totalement au service du texte. Lorsque les mots évoquent une couronne de fleurs, les notes tourbillonnent délicatement les unes autour des autres. Quand Rimbaud parle de la cithare, la voix n’utilise plus que deux notes marcato, comme deux cordes pincées rapidement à l’instrument.
4. Royauté
Cette pièce est dotée d’une introduction majestueuse. Le premier accord, d’une harmonie toute classique, peut presque induire l’auditeur en erreur sur l’époque de composition. Très vite, cette harmonie se complexifie, mais le clin d’œil aux ouvertures à la française de la période baroque se poursuit avec les rythmes pointés qui précèdent l’entrée de la voix.
L’orchestre suit d’abord parfaitement la voix, puis s’en détache pour créer des ambiances particulières et illustrer le texte. Les premiers violons se distinguent grâce à une ritournelle entraînante, tantôt ponctuée par les pizz des violons II, altos et violoncelles, tantôt soulignée par les contrebasses dont la ligne sautillante et ininterrompue évoque les walking bassligne de basse composée d’une note sur chaque temps, formant une mélodie ou un motif mélodique répété du jazz.
6. Interlude
Une grande descente appassionato, legato, commence cet interlude. Ce sont les deuxièmes violons, seuls, qui attaquent, puis la descente se transmet inexorablement aux altos et aux violoncelles. Dès lors, elle ne cessera de couler tout au long de la pièce, arrivant même aux contrebasses dans une ambiance nostalgique et pesante.
La voix n’est pas absente mais se fait attendre : enfin, le violon solo l’introduit en guise de conclusion, où elle répète sur la même note tenue le texte déclamé dans Fanfare.
En conclusion
Britten réussit avec peu de moyens – une voix et un orchestre à cordes – à créer de multiples ambiances qui donnent aux poèmes de Rimbaud une nouvelle dimension. Dans chaque pièce, le compositeur utilise la voix de façon différente, mais toujours dans le même but : magnifier le texte.
Auteure : Bérénice Blackstone