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Le Roi David Arthur Honegger
Carte d’identité de l’œuvre : Le Roi David de Arthur Honegger |
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Genre | musique de scène pour un drame biblique de René Morax |
Librettiste | René Morax |
Langue du livret | français |
Composition | de février à avril 1921 |
Création | le 11 juin 1921 au théâtre du Jorat, à Mézières |
Instrumentation | voix : chœur mixte bois : 2 flûtes (dont 1 piccolo), 1 hautbois (et cor anglais), 2 clarinettes (et clarinette basse), 1 basson cuivres : 1 cor, 2 trompettes, 1 trombone percussions : timbales, 1 petite percussion (cymbales, tambour, grosse caisse, gong, tambourin) claviers : 1 célesta, 1 piano, 1 harmonium cordes : 1 contrebasse et 1 violoncelle ad libitum |
Version oratorio | |
Genre | musique sacrée |
Librettiste | René Morax |
Langue du livret | français ou allemand selon la version |
Composition | en 1923 |
Création | version en allemand : le 2 décembre 1923 à Winterthur, en Suisse version en français : le 14 mars 1924 à la salle Gaveau, à Paris |
Forme de l’œuvre | psaume symphonique en trois parties et 27 numéros |
Instrumentation | voix : 1 récitant, 1 récitante, 3 solistes (soprano, mezzo-soprano, ténor) et chœur mixte effectif orchestral étoffé par rapport à la version de 1921 : l’orchestre est notamment complété par les cordes, une harpe remplace le piano et un orgue l’harmonium. |
Genèse
En 1908, le poète vaudois René Morax crée un théâtre populaire en pleine campagne près de Lausanne, le théâtre du Jorat à Mézières, dont il ditpropos extraits de Honegger de Harry Halbreich, Fayard (1992) qu’il est un théâtre certes pas comme les autres. Une façon de vaste chalet, une sorte d’immense grenier, fleurant la résine, le foin séché, les fruits frais et, les jours de spectacle, les habits du dimanche, mais qui garde la rustique dignité d’un sanctuaire.
Lorsque René Morax décide la réouverture du théâtre après la Première Guerre mondiale, il écrit un nouveau drame biblique sur la vie de David, prêt en décembre 1920, pour une création prévue en juin de l’année suivante. Son frère s’occupe des décors et costumes. Mais qui pour se charger de la musique de scène ? Les compositeurs locaux jusqu’ici sollicités refusent devant la brièveté des délais impartis. Ernest Ansermet, jeune chef de l’orchestre de la Suisse romande, recommande alors Arthur Honegger, un quasi inconnu en Suisse, avis confirmé par le grand Igor Stravinski. Honegger accepte immédiatement, sans même connaître le drame de Morax : Sans bien apprécier l’importance du travail qui m’était confié, j’acceptai avec plaisir, ce sujet convenant parfaitement au « biblique » que je suis
, avouera-t-ilpropos extraits de Honegger de Harry Halbreich, Fayard (1992) bien plus tard.
La grande difficulté de l’entreprise, outre les délais, est l’effectif imposé à Honegger : un chœur amateur d’une centaine de chanteurs, et un ensemble instrumental à peine plus compétent de dix-sept musiciens, dont un seul instrument à cordes ! Stravinski, consulté, donnera à Honegger un conseil qui est un modèle de bon sens : C’est très simple … Faites comme si vous aviez voulu cet ensemble, et composez pour cent chanteurs et dix-sept instrumentistes.
Honegger commenterapropos extraits de Honegger de Harry Halbreich, Fayard (1992) plus tard : Cela paraît très simple, mais par cette seule réponse, j’ai reçu une excellente leçon de composition : ne jamais considérer les données comme une chose imposée, mais au contraire comme une tâche personnelle, comme une nécessité intérieure.
Le 25 février 1921, Honegger entame la composition du psaume L’Eternel est ma lumière infinien° 11 de la partition. Il écrit d’abord les épisodes avec chœur, nécessitant le plus de répétitions. Aussitôt écrit, aussitôt envoyé : Honegger n’a même pas le temps de relire ses partitions. Le 28 avril, l’œuvre est terminée. La création, le 11 juin, sous la direction d’Honegger, est un triomphe malgré les quatre heures de représentation et de nombreuses approximations dans l’exécution.
La version oratorio
À l’été 1923, Honegger reprend sa partition pour transformer le « drame biblique » conçu pour le théâtre en « psaume symphonique en trois parties » exécutable en concert. René Morax réécrit un texte très condensé confié à un récitant, résumant l’action entre les pièces musicales. Seuls les passages jugés trop sensuels pour cette version oratorio, notamment ceux avec Bethsabée, ont été supprimés. L’effectif vocal, outre le récitant et une récitante pour le court rôle de la pythonisse, est constitué de trois solistes (soprano, mezzo-soprano et ténor) et un chœur mixte. L’orchestration est amplifiée pour une formation symphonique traditionnelle : l’effectif de 1921 est notamment complété par les cordes, la harpe remplaçant le piano et l’orgue l’harmonium. Honegger parvient néanmoins à conserver la couleur originelle. Cette version est créée à Winterthur, en allemand, le 2 décembre 1923, puis le 14 mars 1924 à Paris, salle Gaveau. Cette version orchestrale va éclipser totalement la version originale pendant plus de vingt ans, seulement créée à Paris le 4 juin 1947 salle Pleyel.
L’œuvre
Tiré du Premier Livre des Rois et des Premier et Deuxième Livres de Samuel, ainsi que du Psautier Hugenot qui contient des psaumes de Clément Marot et de Théodore de Bèze, l’œuvre raconte la vie de David, de son adolescence comme pâtre jusqu’à sa mort en tant que roi d’Israël, en passant par sa victoire sur Goliath. L’histoire est divisée en trois parties :
- Première partie : David, berger, chef et conducteur d’armée
- Deuxième partie : David, roi
- Troisième partie : David, roi et prophète
En vingt-sept numéros à l’orchestration changeante, l’œuvre jouxte des pages orchestrales, des grands chœurs, des passages confiés aux solistes, d’autres avec récitant, ce dernier alternant sinon avec les numéros musicaux. Parmi les parties chantées, on retrouve neuf psaumes et trois cantiques.
Honegger écrit une musique constituée de courts épisodes très contrastés, lyriques et dramatiques, aussi simples qu’efficaces, proche de la technique de composition pour le cinéma. Sans tomber dans un archaïsme caricatural, il parvient à capter l’auditeur qui est immédiatement placé au cœur du récit, grâce aux sonorités colorées des vents mais également aux passages choraux galvanisants et aux mélodies envoûtantes. Le rythme narratif de l’œuvre est ainsi très rapide – notamment dans les première et troisième parties –, captant d’autant plus l’attention des auditeurs. Outre l’accessibilité de l’écriture musicale, cette efficacité dramatique explique le grand succès de cette version oratorio.
David
De jeune pâtre à roi d’Israël, en passant par sa victoire sur Goliath, la formidable histoire de David, racontée dans les Livres de Samuel et au début du Premier Livre des Rois, en fait un personnage biblique central annonçant la venue du Christ. Musicien et poète, il chante des chants religieux avec accompagnement de musique, des « psaumes », ce qui explique qu’il ait été au Moyen Âge le patron des musiciens puis celui des maîtrises et chorales aux XVIe et XVIIe siècles. Cela explique également l’immense iconographie représentant, outre le pâtre vainqueur de Goliath, le roi David jouant de la harpe ou du psaltérion, et les nombreuses œuvres musicales le prenant pour sujet.
Auteur : Antoine Mignon