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Contrebasse et basse à vent
La Nouvelle-Orléans est légitimement considérée comme le berceau du jazz. À la fin du XIXe siècle, les musiciens s’y répartissent principalement entre les fanfares, appelées brass bands, qui rythment la vie louisianaise, et les orchestres de danse. Les contrebasses à cordes sont présentes dès cette époque dans les orchestres de danse, dont le répertoire est constitué de ragtimes, valses, fox-trots, quadrilles, cake-walks, etc. En revanche, dans les brass bands, le rôle de la basse est tenu par des basses à venttuba, sousaphone, car il doit être assuré par un instrument que l’on peut porter en marchant. Contrebasses et tubas tiennent le même rôle que dans la musique occidentale : ils soutiennent rythmiquement et harmoniquement l’ensemble de la formation.
Dans les brass bands, la basse effectue un balancement fondé sur l’énoncé des fondamentales (et parfois de la quinte), ceci en relation avec le rythme de base exécuté par le joueur de grosse caisse. Ce dernier s’élabore sur une durée de huit temps répartis selon la partition suivante :.
On retrouve également ce procédé dans la main gauche des pianistes de ragtime, et plus tard chez les pianistes de stride.
Le langage utilisé par la contrebasse est quasi identique à celui formulé par le tuba. Cependant, une distinction est identifiable : les tubistes de l’époque utilisent le plus souvent des blanches alors que les contrebassistes jouent plus fréquemment en noires, en répétant deux fois la note qu’ils auraient jouée en blanche.
Compte tenu de la difficulté liée à l’enregistrement de la contrebasse, le tuba est préféré lors des premiers enregistrements de jazz. De ce fait, on entend sur les disques des années 1920 une majorité de basses à vent. Lors des représentations, les contrebasses sont autant utilisées que les basses à vent jusque dans les années 1930. Par la suite, on préfèrera leur légèreté et leur aptitude à swinguer. Toutefois, certains musiciens, tels que Bass Edwards, Walter Page et John Kirby, réussissent largement à « faire swinguer » le tuba en donnant l’illusion d’un jeu de contrebasse en pizzicato.
Deux pionniers
Les deux contrebassistes qui illustrent le mieux le jazz classique sont incontestablement Pops Foster et Wellman Braud. Ils utilisent avec abondance le slap, qui leur a été inspiré par leur aîné le contrebassiste Bill Johnson (1872-1972), et exécutent les lignes de basse avec une force peu commune.
Pops Foster (1892-1968) et Wellman Braud (1891-1966) sont tous les deux nés à La Nouvelle-Orléans. Ils sont requis pour jouer contrebasse à cordes et basse à vent. Ces deux musiciens fondent leur jeu sur le balancement typique de La Nouvelle-Orléans en énonçant principalement la fondamentale et la quinte de chaque accord. Leur solidité rythmique leur permet de mener un groupe de cuivres bien avant que l’amplification n’apparaisse. Lorsqu’ils utilisent l’archet, c’est souvent en son filé en jouant des blanches (ou des rondes), en accentuant les premier et troisième temps. Wellman Braud, qui est le bassiste du grand orchestre de Duke Ellington de 1927 à 1935, utilise l’archet avec une particularité : sa technique lui procure une sonorité proche de celle des basses à vent.
Ed Garland (1895-1980), qui participa en 1922 au premier enregistrement connu d’une contrebasse avec l’orchestre de Kid Ory, Alcide « Slow Drag » Pavageau (1888-1969), Sidney Brown (également tubiste), Steve Brown (vers 1890-1965), John Lindsay (1894-1950) et Billy Marrero (1874-vers 1920), père d’une lignée de contrebassistes louisianais, ont compté parmi les meilleurs musiciens du début du XXe siècle mais leur vie et leur style de jeu ne sont que partiellement connus, faute de documents.
Auteure : Hélène Balse