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Eric Watson (1955-)
Pianiste au lyrisme impétueux dont la virtuosité est nourrie de la fréquentation régulière du répertoire classique pour piano, Eric Watson, le plus français des jazzmen américains, cultive un univers éminemment personnel, qui s’impose par sa puissance inspirée et des couleurs sombres et tourmentées propres à leur créateur.
Né le 5 juillet 1955 à Wellesley (Massachusetts, États-Unis), ancien élève du Oberlin Conservatory (Ohio), Eric Watson a, dès ses débuts, partagé sa carrière entre les États-Unis et la France où il s’est installé en 1978. Affirmant d’emblée des conceptions fortes en matière d’écriture et d’improvisation, il se produit à son arrivée à Paris en solo et en trio, et collabore avec des compagnies de danse, discipline artistique pour laquelle il aura l’occasion d’exercer ses talents de compositeur (Peking Ballet, commande du Radio City Music Hall de New York en 1984). Affirmant une prédilection pour les petites formations, il engage plusieurs échanges avec des musiciens français (trio avec Cesarius Alvim et Daniel Humair) comme avec des solistes de son pays natal (disque en trio avec Ed Schuller et Paul Motian en 1982 ; duo avec John Lindberg qui devient trio avec John Carter). Sa fréquentation de musiciens marqués par le free jazz (tels Joëlle Léandre ou Steve Lacy) et l’influence qu’ont sur lui des pianistes tels que Paul Bley et Cecil Taylor n’empêchent pas de s’exercer son goût pour les formes et la structuration de l’improvisation auquel répond son attachement à Lennie Tristano, Bill Evans ou Mal Waldron. Jalonné d’enregistrements en solo, son œuvre n’est pas sans faire entendre les échos de la musique classique qu’il continue de travailler abondamment en privé. Il cite ainsi Bach, Beethoven, Brahms, Scriabine, Debussy, Ravel, Berg, Webern, Boulez comme des références, mais c’est son interprétation des pièces de Charles Ives, compositeur comme lui d’un entre-deux-mondes, qui semble la plus déterminante dans son art pianistique.
Tout en développant une œuvre de compositeur (Martial Arts pour Martial Solal et l’ONJ en 1986 ; Bénévoles, commande de Radio France en 1998 ; Constellations créée à Marseille en 2001), Eric Watson donne toute la mesure de ses talents de soliste dans une série de formations qui témoignent autant de son attachement à la tradition du jazz (dont il a assimilé nombre de richesses) qu’à son engagement émotionnel dans l’improvisation : trio avec Jean-Paul Celea et Aaron Scott en 1988 ; duo avec la chanteuse Linda Sharrock en 1994 ; trio avec Mark Dresser et Ed Thigpen en 1998 (album Silent Hearts) qui devient « Full Metal Quartet » avec l’adjonction du saxophoniste Bennie Wallace. Après avoir assumé pendant trois ans les fonctions de directeur artistique du festival de jazz de La Villette à Paris, c’est à la tête d’un quartet constitué avec le saxophoniste allemand Christof Lauer qu’Eric Watson revient au devant de la scène, en compagnie de Christophe Marguet et Claude Tchamitchian en 2003.
Auteur : Vincent Bessières
(mise à jour : octobre 2004)