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Excellent tromboniste de pupitre et soliste, Jacques Bolognesi est aussi l’un des artisans du retour en grâce de l’accordéon et de son acclimatation au jazz.
Instrumentiste sollicité
Né le 6 janvier 1947 à Gap, Jacques commence à apprendre l’accordéon dans la boutique de cordonnier de son père, lieu de rendez-vous des immigrés italiens de sa ville natale. Étudiant le piano auprès de la concertiste Madeleine de Valmalette, il suit un cursus au Conservatoire de Grenoble, puis il étudie le trombone – qu’il a découvert à l’âge de treize ans – au Conservatoire national supérieur de Paris où il obtient un premier prix en 1969 après un passage formateur par la Musique de l’Air. Instrumentiste très sollicité, il appartient aux orchestres d’Eddy Louiss, d’Ivan Jullien, de Martial Solal, etc., tout en travaillant dans l’orchestre de la revue du Moulin Rouge. Sa carrière se déclinera ainsi pendant plusieurs années entre une importante activité de sideman dans le milieu du jazz, de musicien de pupitre dans de nombreuses grandes formations, et d’instrumentiste de studio pour la variété et le cinéma.
Retour en grâce de l’accordéon
Au cours d’une séance, le tromboniste antillais Henri Guédon, découvrant son talent caché pour l’accordéon, demande à Bolognesi de l’accompagner sur cet instrument. Par la suite, en 1987, Bolognesi fait partie de l’ONJ d’Antoine Hervé qui écrit pour lui une pièce, Sous les lofts de Paris, qui lui donne l’occasion de s’exprimer sur ce premier instrument qu’il a continué de jouer en privé : J’ai beaucoup travaillé le piano, sans arrêter l’accordéon, que j’entretenais en cachette. Mais dans ma tête, c’était fini, l’accordéon. Il faut dire que je n’osais pas dire que j’en jouais, je me serais couvert de ridicule
. C’est le début d’un retour à des premières amours, dans le sillage de Marcel Azzola et de Richard Galliano, dans le souvenir des précurseurs Gus Viseur et Jo Privat qui marièrent le jazz et la tradition de l’accordéon. Bolognesi est ainsi l’un des participants, en 1990, à l’enregistrement de Paris Musette, l’album emblématique de la renaissance du « piano à bretelles ».
Tout en poursuivant sa carrière de tromboniste, leader du big band Caravansérail (1989-1991), il développe dés lors une importante activité d’accordéoniste, notamment au travers de son association depuis 1994 avec son confrère Francis Varis : d’abord simple duo, BoloVaris devient trio en accueillant le percussionniste « Tiboum » Guignon, ou quintet avec l’adjonction de Marc Fosset à la guitare et Jean-Luc Ponthieux à la contrebasse. Varis et Bolognesi remettent au goût du jour l’accordina (instrument à vent et à anches libres doté d’un clavier-boutons, hybride d’accordéon et d’harmonica) tombé dans l’oubli depuis son invention dans les années 1930. De 1995 à 1999, il appartient à l’ensemble suisse Piano Seven en tant que pianiste et accordéoniste. Musicien d’un éclectisme de bon goût, on le retrouve aussi bien auprès de Cesaria Evora (Cabo Verde, 2002) que de Ute Lemper (Le Voyage d’hiver, 2003), de Patrice Caratini rejouant André Hodeir (Anna Livia Plurabelle, 1993) qu’au sein du Dodecaband de Martial Solal sur la musique d’Ellington (2000), de Mico Nissim composant sur des poèmes de Fernando Pessoa (1996) qu’en concert avec TubaTuba, le groupe des tubistes Michel Godard et Dave Bargeron. Depuis 2004, il est responsable du groupe D’accordéons et d’ailleurs qui regroupe sept des principaux accordéonistes de la capitale venus de tous les horizons, signe que, sous l’influence de musiciens tels que Jacques Bolognesi, cet instrument populaire et nomade a définitivement gagné ses lettres de noblesse et de voyage.
Auteur : Vincent Bessières